Guinée : face aux défis du développement !

1 novembre 2014

Guinée : face aux défis du développement !

En Guinée chez moi, c’est le monde à l’envers. L’intellectuel qui devrait être le modèle de réussite pour tous est laissé à la traîne. Il mène une vie de misère qui laisse les jeunes perplexes quant aux possibilités de réussite qu’offre l’école.

Des écoliers en situation de classe
Des écoliers en situation de classe

5 octobre 2008. On était mardi.Premier jour de classe pour moi en tant qu’enseignant.
En ce matin pluvieux de Conakry, je devais dispenser un cours de français dans une classe du collège « Baba Cissé » : la 7ème. Les élèves étaient jeunes. Très jeunes. Entre 12 et 13 ans pour la plupart.
Pédagogie oblige, je déclinai mon identité et exprimai le souhait que chacun en fasse autant tout en précisant la profession que chacun voudrait exercer à l’avenir.
« Je veux devenir médecin, pilote… » pour les uns, « journaliste, ingénieur … » pour les autres.
Que ne fut ma surprise lorsque, arrivé au tour de Mouctar, celui-ci me dit : « je veux sortir de l’école, aller vendre à Madina» (le plus grand marché de Conakry).
-Sortir de l’école ?
-Oui.Me répondit-il. « Aller vendre, avoir beaucoup d’argent, construire de belles villas, acheter de belles voitures comme mon oncle ».
Je tente alors de le convaincre.
-L’école peut te donner tout.
Vaine tentative.
Calmement, il rétorqua : « L’école n’apporte pas grand-chose chez nous. Mon frère qui était pourtant brillant est au chômage.Il est encore sous la dépendance de ma mère et de mon oncle. »
Pris de court, je trouvais mieux de passer aux suivants.
A y regarder de près, on se rend compte que cette façon de penser n’est pas le propre de Mouctar seulement.Comme lui, de plus en plus de jeunes fondent moins leur espoir sur l’école que sur le commerce ou la pratique d’un métier quelconque.
Motifs.
Tenez ! A l’indépendance, la Guinée fut dirigée par Sékou Touré. Syndicaliste aux tendances autocratiques, il dût son ascension politique non pas à ses multiples diplômes mais à son militantisme, à sa qualité de mobilisateur et d’harangueur des foules. Pas besoin de rappeler que comme Fidel CASTRO et autres, le grand maître de Conakry pouvait tenir en haleine un auditoire de milliers de personnes pendant cinq heures d’affilée. Sans se lasser et sans lasser le public.

Ainsi pour asseoir son pouvoir, il recourut à des méthodes violentes: la méthode du complot permanent.Tout commença en 1960 avec le complot dit « des agents du colonialisme et intellectuels tarés » suivi en 1961 de celui des « enseignants ». Voilà qu’au fil des ans, le pays perdit les meilleurs de ses fils de cette époque. Des intellectuels de tout bord furent arrêtés, emprisonnés ou tués sur l’autel de ses caprices.
Dans un tel système de pensée unique, ces « pauvres » n’avaient pas compris que loin des critères de compétence, l’ascension politique ou administrative est assujettie au degré d’adhésion aux idéaux du chef. Ils l’apprendront à leurs dépens. Pendant ce temps, des fonctionnaires serviles, font la belle vie. Démontrant qu’en Guinée, le 1er de l’école n’est pas forcément celui de la vie.Ils sont nombreux ces fonctionnaires qui, faute de salaire consistant, ploient sous le poids des dettes. Beaucoup vont à la retraite sans avoir réalisé des choses à la mesure de leurs diplômes.

Conséquences : Aux yeux de certains élèves, ils sont tout sauf des modèles de réussite.La précarité dans laquelle ils pataugent ne rassure pas  quant aux possibilités de réussite qu’offre l’école. Dès lors, plus question de se triturer les méninges pour comprendre par exemple les théorèmes de Pythagore ou de Thalès. Einstein, Watt ou Pasteur sont loin de leur univers. Les plaisirs, les interrogations,la tristesse parfois la colère que suscitent les écrits d’Hugo, Senghor ou Césaire leur sont étranges.
L’injustice des pratiques politico-administratives les prédisposent-ils à mesurer à juste valeur l’importance d’un intellectuel ? J’en doute fort.
Pour eux, la réussite se trouve non pas dans un bureau mais derrière le comptoir d’une boutique. Car les belles villas des quartiers chics de Conakry( Kipé, Lambanyi…) sont pour la plupart la propriété des commerçants. Ceux pour qui voyager sur Paris, Bruxelles ou Dubaï fait désormais partie de l’ordinaire. Lors des cérémonies de baptême ou de mariage ils sont facilement identifiables. Non seulement par le luxe de leurs vêtements, voitures ou téléphones mais aussi par la considération qu’on leur accorde. Devant leur pouvoir financier, certains principes gérontocratiques sont négligés ou carrément battus en brèche.
Pas de surprise donc de retrouver Mouctar à Madina. Vraisemblablement il a commencé à faire fortune auprès de son oncle dans le domaine des produits cosmétiques. Ses cahiers, ses livres et les murs délabrés de son école sont pour lui de lointains souvenirs désormais. Sa seule préoccupation pour l’heure, me dit-il, est de comprendre mieux les rouages du marché afin de résister à la concurrence.

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Commentaires

Susan
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Ce est le moment idéal pour faire des plans pour l'avenir et il est temps d'être heureux . Je ai lu ce poste et si je pouvais je désire vous suggérer des choses ou des conseils intéressants . Peut-être que vous pouvez écrire prochains articles faisant référence à cet article. Je veux lire encore plus de choses à ce sujet!

mamadousaidoubalde
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merci de prendre ton temps pour lire mes articles.j'en suis tres heureux SUSAN.rassure toi que je suis impatient de recevoir tes conseils et suggestions.
Bien a toi et bonne année.

Maria
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Site idéal , je ne avais pas rencontré tougue.mondoblog.org dans mes recherches ! Poursuivre le travail fantastique! meilleurs vœux

mamadousaidoubalde
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je suis tres enchanté de savoir que vous me lisez.vos critiques et suggestions me seront d'un apport inestimables.Merci et bonne annee.

Mamadou Yaya Baldé
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Un bel article!

Manana
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Magnifique soumettre , très intéressant . Je me demande pourquoi les experts opposés de ce secteur ne ont pas remarqué cela. Vous devez continuer votre écriture . Je suis sûr que , tougue.mondoblog.org ont une base de lecteurs déjà énormes !

mamadousaidoubalde
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merci MANAMA.Merci pour lattention que tu portes a mes ecris.

Ibrahima kebe
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oh mon ni minant prof j'avoue que cet article détaille toute les réalités de ma chère guinée à savoir(économique, intellectuel, politique et socio-culturelle.). Mais a cet article il manque un ouf d'encouragement au autres élevées qui envisagées un avenir opposées a celui du jeune Mouctar

mamadousaidoubalde
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merci kebe.je prends bonnes notes de tes remarques.